Conseil d’État, 7 juillet 2022, n° 454789
FAITS
Par une décision du 13 juillet 2017, la maire de Paris s’est opposée à la déclaration préalable de travaux présentée par la société CSF le 4 juillet 2017 en vue de transformer un local occupé par un commerce de boucherie en supérette et d’en modifier les façades.
La maire de Paris a fait application de la version de l’article R.421-14 antérieure au décret du 28 décembre 2015, celle qui renvoyait à l’article R.123-9 pour caractériser un changement de destination. L’ancienne nomenclature identifie en effet le commerce et l’artisanat comme deux destinations différentes et, pour la Ville de Paris, la boucherie se rattachait à l’artisanat. Ce n’est plus le cas dans la nouvelle nomenclature résultant des articles R.151-27 et 28, à laquelle renvoie désormais l’article R.421-14 : l’artisanat et le commerce de détail figurent dans la même sous-destination et il n’y a donc pas de changement à passer d’une boucherie à une supérette.
Par un jugement du 7 février 2019 (TA 7 février 2019, Société CSF, n°1719507), le tribunal administratif de Paris a rejeté le recours formé par cette société contre cette décision ainsi que contre celle rejetant son recours gracieux.
La cour administrative d’appel de Paris de Paris ayant annulé ce jugement (CAA Paris 20 mai 2021, Société CSF, n° 19PA00986), la Ville de Paris se pourvoit en cassation.
Question
Quel est le champ d’application des autorisations d’urbanisme en cas de changement de destination ?
Décision
Le Conseil d’État juge que les règles issues du décret du 28 décembre 2015 définissant les projets soumis à autorisation d’urbanisme, selon notamment qu’ils comportent ou non un changement de destination d’une construction existante, sont entrées en vigueur le 1er janvier 2016, sans qu’ait d’incidence à cet égard le maintien en vigueur, sauf décision contraire du conseil municipal ou communautaire, de l’article R.123-9 du code de l’urbanisme dans sa rédaction antérieure au 1er janvier 2016, dans les hypothèses prévues au VI de l’article 12 du décret du 28 décembre 2015.
Les règles soumettant les constructions à permis de construire ou déclaration de travaux, dont un plan local d’urbanisme ne saurait décider et qui relèvent d’un autre livre du code de l’urbanisme, sont définies, pour l’ensemble du territoire national, par les articles R.421-14 et R.421-17 du code de l’urbanisme, qui renvoient, depuis le 1er janvier 2016, pour déterminer les cas de changement de destination soumis à autorisation, aux destinations et sous-destinations identifiées aux articles R.151-27 et R.151-28 de ce code.
C’est donc à bon droit que la Cour administrative d’appel de Paris a d’une part jugé que la procédure administrative applicable au projet de la société CSF, postérieur au 1er janvier 2016, devait être déterminée par application des dispositions de l’article R.421-14 du code de l’urbanisme issues du décret du 28 décembre 2015, nonobstant la circonstance que le plan local d’urbanisme de la Ville de Paris était en cours de modification le 1er janvier 2016 et, d’autre part, en a déduit que la demande de cette société n’était plus soumise à permis de construire mais à déclaration préalable dès lors que la modification projetée d’une boucherie en commerce ne constituait, désormais, plus un changement de destination.
Commentaire
Le Conseil d’État règle la question des modalités d’application dans le temps de la réforme introduite par le décret du 28 décembre 2015 qui a substitué aux neuf destinations de l’article R.123-9 du code de l’urbanisme une liste de cinq destinations et de vingt sous-destinations fixées respectivement par les articles R.151-27 et R. 151-28 du même code.
La nécessité d’obtenir une autorisation d’urbanisme est appréciée au regard des nouvelles destinations des articles R.151-27 et R.151-28, alors même que le contrôle de la conformité du projet au règlement du PLU se fera au regard des anciennes catégories, dans les communes ayant un document d’urbanisme rédigé sous l’empire des anciennes dispositions.