Moins de deux ans après la loi climat de 2019, en réponse aux conclusions de la Convention citoyenne pour le climat, le législateur a adopté un nouveau cadre juridique applicable à la transition énergétique.
Riche de 305 articles et organisée en sept titres, la loi n°2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets couvre les thématiques suivantes :
- Titre Ier : Atteindre les objectifs de l’accord de Paris et du pacte vert pour l’Europe ;
- Titre II : Consommer ;
- Titre III : Produire et travailler ;
- Titre IV : Se déplacer ;
- Titre V : Se loger ;
- Titre VI : Se nourrir ;
- Titre VII : Renforcer la protection judiciaire de l’environnement.
Le présent feuilleton vous propose de parcourir quelques morceaux choisis de la loi en 4 épisodes:
- Épisode 01: l’énergie dans le bâtiment
- Épisode 02: l’adaptation de la commande publique
- Épisode 03: la réhabilitation des fiches industrielles
- Épisode 04: l’objectif « zéro artificialisation nette »
Principes et incitations
La loi Climat et Résilience valorise les objectifs de développement durable en les inscrivant aux côtés des principes fondamentaux de la commande publique, dans le titre liminaire du code. Au-delà du symbole, cette mesure est importante dès lors que les règles de la commande publique sont toujours interprétées à la lumière de ces principes :
« Les acheteurs et les autorités concédantes respectent le principe d’égalité de traitement des candidats à l’attribution d’un contrat de la commande publique. Ils mettent en œuvre les principes de liberté d’accès et de transparence des procédures, dans les conditions définies dans le présent code. Ces principes permettent d’assurer l’efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics. » (L.3 CCP)
Nouveau : « La commande publique participe à l’atteinte des objectifs de développement durable, dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale » (L.3-1 CCP)
Cette valorisation se prolonge au stade de la définition du besoin. A cet égard, le code prévoyait déjà la prise en compte des objectifs de développement durable lors de la détermination de la nature et de l’étendue du besoin par l’acheteur ou l’autorité concédante.
La loi climat & résilience vient compléter cette obligation en l’étendant à la phase de formalisation du besoin par des spécifications techniques (L.2111-2 et L.3111-2 CCP) : « Ces spécifications techniques prennent en compte des objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale. »
Il convient également de relever les mesures prises afin de renforcer les schémas de promotion des achats publics socialement et écologiquement responsables (SPASER), lesquels constituent un outil incitatif clef dans la diffusion des bonnes pratiques (art. L. 2111-3 CCP). Le SPASER doit désormais comporter des indicateurs précis exprimés en nombre de contrats ou en valeur, sur les taux réels d’achats publics relevant des catégories de l’achat socialement ou écologiquement responsable.
Processus d’attribution
La loi prévoit l’obligation pour les acheteurs et les autorités concédantes, de retenir au moins un critère d’attribution prenant en compte les caractéristiques environnementales de l’offre (L.2152-7 et L.3124-5 CCP) :
« Au moins un de ces critères prend en compte les caractéristiques environnementales de l’offre. »
Cette mesure fera sans doute l’objet de précisions règlementaires ou d’interprétations jurisprudentielles : d’une part, s’agissant de la notion même de « prise en compte », et d’autre part, s’agissant des conséquences de cette mesure sur l’existence d’un critère unique d’attribution relatif au prix.
Cette mesure devrait inciter à remplacer le critère du prix par le critère financier du coût global ou du coût du cycle de vie. A cet égard, la loi prévoit la mise à disposition par l’État d’outils opérationnels de définition et d’analyse du coût de cycle de vie des biens pour les principaux segments d’achats. Ces outils intègrent le coût global lié notamment à l’acquisition, à l’utilisation, à la maintenance et à la fin de vie des biens ainsi que, lorsque c’est pertinent, les coûts externes supportés par l’ensemble de la société, tels que la pollution atmosphérique, les émissions de gaz à effet de serre, la perte de la biodiversité ou la déforestation.
Par ailleurs, la loi prévoit la possibilité pour un acheteur ou une autorité concédante d’exclure un soumissionnaire qui, soumis par le code de commerce à l’obligation d’établir un plan de vigilance, ne satisfait pas à cette obligation pour l’année qui précède celle de l’engagement de la consultation (L.2141-7-1 et L.3123-7-1 CCP).
Contenu des contrats
La loi prévoit plusieurs mesures concernant les « conditions d’exécution » des contrats.
Pour rappel, les clauses du contrat précisent les conditions d’exécution des prestations, lesquels doivent être liées à son objet. Le code retient une appréciation large des conditions d’exécution. Elles peuvent prendre en compte des considérations relatives à l’économie, à l’innovation, à l’environnement, au domaine social, à l’emploi ou à la lutte contre les discriminations. Elles sont réputées liées à l’objet du contrat dès lors qu’elles se rapportent aux travaux, fournitures ou services objet du contrat, à quelque égard que ce soit et à n’importe quel stade de leur cycle de vie.
Désormais, les acheteurs et les autorités concédantes ont l’obligation et non plus la simple faculté de fixer dans leurs contrats, des conditions d’exécution prenant en compte des considérations relatives à l’environnement (L.2112-2 et L.3114-2 CCP).
De plus, les acheteurs et les autorités concédantes ont désormais l’obligation pour les marchés et les concessions dont le montant est supérieur aux seuils européens, de prévoir des conditions d’exécution prenant en compte des considérations relatives au domaine social ou à l’emploi, notamment en faveur des personnes défavorisées (L.2112-2-1 et L.3114-2-1 CCP). Le texte prévoit néanmoins des dérogations permettant d’écarter les clauses dites « sociales » chaque fois qu’elles s’avèrent non pertinentes.
Enfin, à compter du 1er janvier 2030, l’usage des matériaux biosourcés ou bas-carbone devra être prévu dans au moins 25 % des rénovations lourdes et des constructions relevant de la commande publique. Un décret en Conseil d’État devra préciser les modalités d’application, en particulier la nature des travaux de rénovation lourde et les seuils au-delà desquels l’obligation est applicable aux acheteurs publics.