Requalification d’une concession d’aménagement en marché public faute de risque

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CE 18/05/2021, n°443153

Une concession d’aménagement qui ne transfère pas le risque économique de l’exploitation au concessionnaire doit-elle être requalifiée en marché public ?

La commune de Liévin a confié, par un contrat conclu le 12 août 1991, l’aménagement d’une friche à Liévin à la société immobilière de construction de Liévin. Ce contrat a été repris tant par la communauté d’agglomération de Liévin, venue aux droits de la commune de Liévin, que par la société Territoires 62, succédant à la société Adévia qui avait elle-même succédé à la société Artois Développement, laquelle était venue aux droits de la société immobilière de construction de Liévin.

Le contrat de concession 12 août 1991 a été conclu en application de l’article L.300-4 du code de l’urbanisme, dans sa rédaction applicable à la même date, selon lequel « L’État, les collectivités locales ou leurs établissements publics peuvent confier l’étude et la réalisation des opérations d’aménagement prévues par le présent livre à toute personne publique ou privée y ayant vocation (…) ».

La question de la qualification de la convention a été soumise à l’appréciation du juge administratif.

L’absence de risque économique, critère de la qualification en marché public

Après avoir rappelé qu’en application du code des marchés publics, dans sa version applicable à la date de conclusion du traité de concession, « un marché public est un contrat conclu par les collectivités publiques en vue de la réalisation de travaux, fournitures et services en contrepartie d’un prix », le Conseil d’État relève que la Cour administrative d’appel a souverainement déduit de ces stipulations sans les dénaturer, que le concessionnaire n’a pris aucun risque financier dans cette opération, le concédant, c’est-à-dire la collectivité publique, supportant seul tous ces risques. 

Le Conseil d’État juge alors que la Cour a ni commis une erreur de droit ni une erreur de qualification juridique, en estimant que le contrat litigieux, bien que formellement conclu en qualité de concession d’aménagement soumis aux dispositions de l’article L.300-4 du code de l’urbanisme, dès lors que la rémunération du cocontractant n’est pas substantiellement liée aux résultats de l’opération d’aménagement, constitue un marché public.

Une question d’actualité

La décision rappelle en premier lieu que les dispositions législatives relatives aux concessions d’aménagement ont pour effet de soustraire au respect des règles régissant les marchés publics les contrats confiant à un tiers l’étude et la réalisation d’opérations d’aménagement prévues par le code de l’urbanisme dans sa version alors applicable, s’ils entrent dans le champ de l’article 1er du code des marchés publics alors applicable.

Cette décision n’a pas qu’un intérêt historique. Aujourd’hui encore, il est nécessaire de déterminer si la concession d’aménagement dont l’attribution est envisagée entraîne ou non un transfert du risque économique de la personne publique concédante vers le concessionnaire. En effet, les règles de passation des concessions d’aménagement se composent :

– des règles du code de la commande publique, entré en vigueur le 1er avril 2019,

– de celles du code général des collectivités territoriales (CGCT),

– et de celles du code de l’urbanisme. Ces dernières distinguent : la procédure relative aux concessions d’aménagement transférant un risque économique (articles R. 300-4 à R. 300-9), pour laquelle il est essentiellement renvoyé aux règles de la troisième partie du code de la commande publique relatives aux contrats de concession, complétées de certaines spécificités ;

La procédure relative aux concessions d’aménagement ne transférant pas un risque économique (articles R.300-11-1 à R.300-11-3), est prévue:

– pour l’État et ses établissements publics, dans la deuxième partie du code de la commande publique relatives aux marchés publics;

– pour les collectivités territoriales, leurs établissements publics et leurs groupements, dans le code général des collectivités territoriales dont les dispositions renvoient elles-mêmes à celles du code de la commande publique.

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