La vente d’un bien public est parfaite en présence d’un prix objectivement déterminable

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CE, 26 janv. 2021, n° 433817, Sté Pigeon Entreprises c/ Cne Châteaubourg

Faits

Par deux délibérations de 2011 et 2013, le conseil municipal d’une commune a décidé de donner une suite favorable à une offre d’achat d’une entreprise concernant un terrain de son domaine privé en vue d’y implanter une centrale à béton, au sein d’une zone artisanale à créer.

Ces délibérations fixaient un prix au mètre carré provisoire, incluant un coût estimatif des travaux de viabilisation des parcelles cédées à réaliser par la commune, révisable à la hausse ou à la baisse, en fonction du coût réel desdits travaux qui résulterait d’appels d’offres futurs.

Toutefois, par une délibération de 2016, le conseil municipal a décidé de retirer les délibérations précédentes aux motifs que l’acquéreur n’avait jamais pris d’initiative pour la réalisation de son projet, ne s’était jamais manifesté pour la signature d’un acte authentique, qu’aucun prix définitif n’a jamais été fixé et que la zone a connu une évolution ne permettant plus l’implantation d’une centrale à béton pour des motifs d’ordre public liés à la sécurité et à la tranquillité publiques notamment en raison de la présence de zone d’habitations.

L’entreprise se pourvoit en cassation contre l’arrêt par lequel la Cour administrative d’appel rejetant sa demande d’annulation de la dernière délibération.

Question

Quelles sont les conditions pour retirer une délibération approuvant la cession d’un bien du domaine privé?

Décision

Le Conseil d’État considère que les parties concluent une vente parfaite au sens du code civil lorsqu’elles se sont accordées sur une chose « suffisamment désignée dans sa quotité » et sur un prix « objectivement déterminable ».

Ainsi, la délibération du conseil municipal qui suit une offre d’achat et approuve de telles modalités de cession d’un bien du domaine privé, constitue un acte créateur de droits, lequel ne peut être retiré après le délai de quatre mois, y compris pour motif d’intérêt général.

Commentaire

Le Conseil d’État précise ainsi sa jurisprudence concernant l’articulation des règles de retrait des actes créateurs de droit et des dispositions du code civil relatives à la formation d’une vente (Voir récemment : CE, 15 mars 2017, SARL Bowling du Hainaut, req. n° 393407 ; Conseil d’État, 29/07/2020, n°427738, SIVOM de la région de Chevreuse), dans le cas particulier d’un prix déterminable.

A cet égard, l’article 1591 du code civil dispose que « le prix de la vente doit être déterminé et désigné par les parties ». Pour l’application de ces dispositions, le Conseil d’État considère qu’un prix doit être regardé comme suffisamment déterminé s’il est déterminable en fonction d’éléments objectifs ne dépendant pas de la volonté d’une partie, à savoir en l’espèce le coût des travaux de viabilisation dont le montant précis ne pouvait être connu qu’à l’issue des procédures d’appel d’offres.

En conséquence, en jugeant que la commune avait pu légalement retirer les deux délibérations litigieuses, la Cour administrative d’appel a commis une erreur de droit et l’entreprise est donc fondé, à demander l’annulation de l’arrêt qu’il attaque.

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