Conseil d’État, 31 janvier 2022, n°449496.
faits
Le 12 avril 2018, le maire d’une commune a délivré une décision de non-opposition à déclaration préalable de lotissement pour la division d’un terrain, situé sur sa commune.
Un an plus tard, par une décision du 5 janvier 2019, le maire a accordé à deux requérants un permis de construire tacite pour la construction d’une maison individuelle et d’une piscine sur une parcelle issue de cette division. Le 7 janvier 2020, ce permis a été transféré à un autre requérant.
Des voisins directs de la parcelle concernée par ce projet de construction ont alors saisi le tribunal administratif de Lyon en vue d’obtenir l’annulation pour excès de pouvoir de la décision du 5 janvier 2019 par laquelle le maire a tacitement délivré aux requérants un permis de construire. Ils estimaient que le maire aurait dû surseoir à statuer dès lors que le projet était de nature à compromettre l’exécution du Plan Local d’Urbanisme et de l’Habitat (PLU-H).
Par un jugement du 10 décembre 2020, le tribunal administratif de Lyon a annulé pour excès de pouvoir ce permis de construire, reconnaissant que le projet était de nature à compromettre et à rendre plus onéreux l’exécution du plan local d’urbanisme et de l’habitat de la métropole de Lyon en cours. Il a ainsi estimé que le maire avait commis une erreur manifeste d’appréciation en n’opposant pas un sursis à statuer à la demande de permis.
Le bénéficiaire du permis de construire a alors formé un pourvoi en cassation devant le Conseil d’État pour obtenir notamment l’annulation du jugement du tribunal administratif de Lyon.
Question juridique
Le bénéficiaire d’une décision de non-opposition à déclaration préalable portant sur un lotissement peut-il se voir opposer un sursis à statuer à sa demande de permis de construire dans les cinq années suivant cette décision ?
décision
Le Conseil d’État vient tout d’abord rappeler la possibilité offerte à l’autorité compétente de surseoir à statuer sur les demandes d’urbanisme et cela conformément aux dispositions de l’article L.153-11 du code de l’urbanisme.
Néanmoins, il rappelle la limite consacrée par l’article L.442-14 du code de l’urbanisme selon laquelle lorsque le lotissement a fait l’objet d’une déclaration préalable, le propriétaire du terrain ne pourra se voir refuser par la commune la délivrance d’un permis de construire de la date de non-opposition à la déclaration préalable, et ce pendant cinq années.
Il estime ainsi que le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant que le maire de la commune avait entaché sa décision d’illégalité en n’opposant pas, moins de cinq ans après la décision de non-opposition, un sursis à statuer à la demande de permis de construire sur une parcelle du lotissement au motif que le projet litigieux était de nature à compromettre l’exécution du futur plan local d’urbanisme et de l’habitat de la métropole de Lyon.
Il considère en effet « qu’il résulte de l’article L. 442-14 du code de l’urbanisme que l’autorité compétente ne peut légalement surseoir à statuer, sur le fondement de l’article L. 424-1 du même code, sur une demande de permis de construire présentée dans les cinq ans suivant une décision de non-opposition à la déclaration préalable de lotissement au motif que la réalisation du projet de construction serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme ».
Le jugement du tribunal administratif est donc annulé par le Conseil d’État.
commentaire
Le Conseil vient ainsi, dans cet arrêt, préciser l’articulation entre les articles L. 442-14 et L. 424-1 du code de l’urbanisme.
En effet, à ce titre, et conformément à la jurisprudence administrative, et aux dispositions de l’article L.424-1 du code de l’urbanisme, la cristallisation qui découle d’un certificat d’urbanisme cristallise également la possibilité pour un maire d’opposer un sursis à statuer à l’encontre d’une autorisation d’urbanisme.
Ainsi, l’effet de la décision de non-opposition à déclaration préalable émise par une personne publique cristallise les règles d’urbanisme en vigueur.
Le Conseil d’État semble vouloir en tout état de cause sauvegarder la sécurité juridique des bénéficiaires d’une autorisation d’urbanisme en appliquant de manière restrictive les dispositions du code de l’urbanisme et en consacrant la cristallisation des règles d’urbanismes dans les lotissements suite à l’octroi d’une déclaration de non-opposition.