Compétence administrative sur le refus de renouvellement d’un contrat d’occupation domaniale

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Tribunal des Conflits, 05/07/2021, C4213

Les données du litige

Le site du Grand Parquet, situé dans la forêt domaniale de Fontainebleau et géré par l’établissement public industriel et commercial (EPIC) « Pays de Fontainebleau Tourisme » a été, par des contrats conclus chaque année de 2007 à 2014, mis à la disposition d’une association pour y organiser un concours hippique dénommé « l’été du Grand Parquet ». 

Par un courrier du 26 septembre 2014, le président de l’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme a informé la présidente de l’association que l’été du Grand Parquet ne serait pas organisé en 2015. 

Le 7 avril 2016, l’association et sa présidente ont saisi le tribunal administratif de Melun d’une demande tendant à ce que l’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme soit condamné à leur verser une indemnité en réparation du préjudice qu’ils estimaient avoir subi du fait du refus de renouvellement des relations contractuelles. 

Par jugement du 22 décembre 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande comme portée devant une juridiction incompétente pour en connaître. L’association et sa présidente ont alors saisi le tribunal de commerce de Paris d’une demande d’indemnisation pour rupture brutale d’une relation commerciale établie, sur le fondement du 5° du I de l’article L. 442-6 du code de commerce. 

Par jugement du 16 septembre 2019, le tribunal de commerce a jugé que le litige relevait de la compétence de la juridiction judiciaire et renvoyé les parties à une audience ultérieure pour qu’il soit statué sur le bien-fondé des demandes. L’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme a interjeté appel sur la compétence devant la cour d’appel de Paris laquelle a renvoyé au Tribunal des Conflits sur le fondement de l’article 32 du décret n° 2015-233 du 27 février 2015, le soin de décider de la question de compétence.

La compétence administrative, conséquence de l’appartenance de la dépendance au domaine public

Après avoir rappelé les termes des articles L.2331-1 1), L.2111-1 2) et L.2212-1 3) du code général de la propriété des personnes publiques, le Tribunal des Conflits analyse le régime juridique applicable au site. La question, en particulier, était celle de l’appartenance du site du Grand Parquet au domaine privé ou au domaine public de l’État. 

Le Tribunal des Conflits relève en premier lieu que le site du Grand Parquet, qui appartient à l’État et ne relève pas du régime forestier, a été mis à la disposition de la commune de Fontainebleau par une convention d’occupation qu’elle a transférée à la communauté de communes du pays de Fontainebleau, laquelle, par convention du 29 juillet 2011, en a délégué la gestion et l’exploitation à l’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme, de sorte que : d’une part, l’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme est chargé, dans l’intérêt général, d’exploiter le stade équestre du Grand Parquet par l’organisation de compétitions sportives et de manifestations pour le grand public et de mettre en oeuvre une politique d’animation qui intègre notamment les publics jeunes et scolaires. Le site doit dès lors être regardé comme affecté au service public ; 

– d’autre part, il comporte des aménagements indispensables à l’exécution des missions de ce service public. Le site du Grand Parquet doit dès lors être regardé, en application de l’article L.2111-1 du code général de la propriété des personnes publiques cité au point 2 ci-dessus, comme appartenant au domaine public

– Le Tribunal des Conflits observe en second lieu, que l’objet des contrats conclus entre l’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme et l’association consistait en une mise à disposition de l’ensemble du site du Grand Parquet et de tous ses équipements, pendant une période de plusieurs jours par an. Ces contrats comportaient ainsi une occupation du domaine public que constitue ce site et avaient par suite la nature de contrats administratifs

En conséquence, le Tribunal des Conflits juge que le litige résultant du refus de l’EPIC Pays de Fontainebleau Tourisme de conclure un nouveau contrat pour l’année 2015, qui n’oppose pas le gestionnaire d’un service public industriel et commercial à ses usagers, mais porte sur le refus de conclusion d’une convention d’occupation temporaire du domaine public, doit, alors même que l’association et sa présidente se prévalaient devant le tribunal de commerce du 5° du I de l’article L. 442-6 du code de commerce, être porté devant la juridiction administrative.

Portée

Lorsque l’objet des contrats conclus entre un EPIC et une personne privée consiste en une mise à disposition d’une dépendance du domaine public, il convient de considérer que ces contrats comportent ainsi une occupation du domaine public et ne concernent pas les relations que peut avoir l’EPIC avec ses usagers. Le refus de renouveler l’autorisation d’occupation de ce domaine porte donc sur un litige relatif à l’occupation du domaine public relevant légalement de la compétence du juge administratif en application de l’article L.2331- 1 du code général de la propriété des personnes publiques. 

Il appartient au juge administratif de connaître de ce litige, y compris si la personne privée occupante entend se prévaloir des dispositions du 5° du I de l’article L. 442-6 du code de commerce pour obtenir une indemnité à raison de « la rupture brutale d’une relation commerciale établie ». 

Le Tribunal des Conflits avait déjà rappelé la compétence du juge administratif pour connaître de telles conclusions dès lors que le contrat est administratif (TC 8 février 2021, SNCF et SNCF Réseau c/ Société Entropia Conseil, req. n°4201).

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