Le recours d’un tiers contre le permis modificatif suspend le délai de validité du permis initial

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Dans une décision du Conseil d’État (CE, 19 juin 2020, n°434671), le juge se prononce sur le délai de validité d’un permis de construire initial, dont le modificatif avait fait l’objet d’une annulation par le tribunal administratif.

Permis de construire et permis modificatif

Dans les faits d’espèce, un permis de construire portant sur la réalisation d’une maison individuelle avait été délivré le 5 septembre 2014.

Le 5 août 2017, un permis de construire modificatif avait été délivré. Sur la requête de la propriétaire voisine, le tribunal administratif de Lyon, par un jugement devenu définitif, a annulé ce permis modificatif.

Le détenteur du permis initial a dès lors entamé les travaux afin de réaliser le projet tel qu’autorisé par le permis de construire initial qui lui avait été délivré en 2014 et dont il entendait se prévaloir.

La propriétaire voisine a alors sollicité du maire de Saint-Didier-au-Mont-d’Or de constater la caducité de ce permis de construire, de dresser un procès-verbal d’infraction aux fins de transmission au procureur de la République et de prendre un arrêté interruptif de travaux.

La commune ayant refusé de constater la caducité du permis, la requérante a reformulé ses demandes devant le juge des référés du tribunal administratif de Lyon.

La décision du Tribunal administratif

Par une ordonnance n° 1906562 du 11 septembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a alors suspendu l’exécution de la décision du 12 août 2019 du maire de Saint-Didier-au-Mont-d’or et a enjoint au maire de constater la caducité du permis de construire du 5 septembre 2014 et de prendre un arrêté interruptif de travaux.

Pour rappel, l’article R.424-17 du code de l’urbanisme dispose que :

 » Le permis de construire, d’aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de trois ans à compter de la notification mentionnée à l’article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. (…) Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. (…) ».

Aux termes du premier alinéa de l’article R. 424-19 du même code :

 » En cas de recours devant la juridiction administrative contre le permis ou contre la décision de non-opposition à la déclaration préalable ou de recours devant la juridiction civile en application de l’article L.480-13, le délai de validité prévu à l’article R.424-17 est suspendu jusqu’au prononcé d’une décision juridictionnelle irrévocable « .

La décision du Conseil d’État

Or, selon le Conseil d’État, il résulte de la combinaison de ces dispositions que, si la délivrance d’un permis de construire modificatif n’a pas pour effet de faire courir à nouveau le délai de validité du permis de construire initial, le recours contentieux formé par un tiers à l’encontre de ce permis modificatif suspend ce délai jusqu’à l’intervention d’une décision juridictionnelle irrévocable.

Il constate ainsi que le juge des référés du tribunal administratif de Lyon a, eu égard à son office, entaché son ordonnance d’erreur de droit.

Le détenteur du permis initial était donc fondé à se prévaloir de son autorisation initiale afin d’entreprendre ses travaux : c’est une solution pragmatique que propose ici le Conseil d’État.

En effet, si en 2018, le juge avait estimé que le recours engagé par le pétitionnaire contre un refus de permis modificatif était sans effet sur le délai de validité du permis initial (CE, 21 févr. 2018, n° 402109), le cas d’espèce est différent. Dans l’hypothèse où la demande de permis modificatif a été acceptée par le maire, les modifications engagées sont légalement autorisées. Il apparait ainsi légitime que le pétitionnaire ait pu attendre le caractère définitif de ce dernier pour entreprendre les travaux (en ce compris les travaux autorisés par le permis modificatif), la délivrance du modificatif pouvant conditionner la faisabilité globale d’une l’opération.

Dès lors, le pétitionnaire qui attend l’issue de l’instance en cours contre son permis modificatif ne sera pas sanctionné par une péremption de son autorisation initiale, dont il pourra se prévaloir en cas d’annulation juridictionnelle du permis modificatif.

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