Terra nova vient de rendre publique une passionnante étude intitulée « Smart city : quelles relations public-privé pour rendre la ville plus intelligente ? »
Synthèse
« La smart city est une réponse, fondée sur les technologies numériques et la donnée, aux défis auxquels sont confrontés les territoires urbains : sécurité, pollution, gaspillage énergétique, changement climatique, urbanisation galopante, inégalités et exclusion sociale… Elle poursuit un objectif essentiel : améliorer la qualité de vie des citoyens.
Si elle est portée par une dynamique indéniable, la ville intelligente fait cependant face à un double risque : d’une part, rester à l’état d’outil marketing, passant à côté des potentialités du numérique pour les territoires, et, d’autre part, échapper aux collectivités publiques, au profit des plateformes numériques et plus généralement des opérateurs privés. Dans ce contexte, le rôle des collectivités publiques doit être réaffirmé.
Mais la transformation numérique des territoires ne peut se faire contre les acteurs privés de la ville ni sans eux. Les relations public-privé doivent ainsi être mieux organisées pour favoriser l’émergence de villes intelligentes en France. En particulier dans trois domaines : la réalisation des investissements nécessaires, le renforcement de la « transversalité » de la ville et la complémentarité entre services publics et privés. Ce sont ces trois enjeux que présente ce rapport de Terra Nova ».
Accéder à l’étude –> ICI.
Les auteurs
L’étude a été conduite par :
- Carine Staropoli, Professeur associée à l’École d’économie de Paris, maître de conférences en sciences économiques à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Directrice adjointe de la chaire Économie des partenariats public-privé (IAE Paris), et
- Benoît Thirion, Associé de la société de conseil Altermind, maître de conférences à Sciences Po.
L’approche
L’étude est organisée selon 3 axes qui constituent, en réalité, les principales propositions retenues:
- Le secteur public doit investir dans la smart city en mobilisant mieux les acteurs publics,
- Le secteur public doit organiser la transversalité intrinsèque des smart cities avec les acteurs privés,
- Le secteur public doit mettre en œuvre une régulation précise des acteurs privés.
Les conclusions
L’étude développe ainsi un raisonnement fondé sur le rôle central des acteurs publics dans le développement des smart cities, ce qui est à la fois logique et excessif.
– Logique d’abord car une ville, quelle que soit la définition retenue, est bien un territoire placé sous la responsabilité d’une collectivité territoriale et dotée d’équipements publics. Il n’y a donc rien d’anormal à ce que le secteur public conçoive, réalise et fasse fonctionner ce qui relève de sa compétence.
Tout va de soi mais l’étude affine très utilement la réflexion collective sur de nombreux points tels que la rénovation des infrastructures existantes et pas seulement la réalisation de nouveaux équipements, l’échelle territoriale pertinente ou encore les outils de financement innovants.
– Excessif car la vision de l’étude, fondamentalement structurée par l’économique et le social, n’intègre pas la superposition grandissante des affectations juridiques de la ville: sur le socle des infrastructures publiques, parfaitement repéré, se développe progressivement une couche de services nouveaux. Mais rien ne prédestine de façon absolue ces services nouveaux à être nécessairement publics: ils peuvent l’être s’ils rentrent dans les critères du service public mais peuvent aussi ne pas l’être…
A titre d’exemple, si un lampadaire constitue sans aucun doute une infrastructure publique, les nouveaux services qui vont pouvoir s’y greffer (type LiFi) n’ont pas forcément de lien avec la finalité essentielle de l’infrastructure (l’éclairage public dans notre exemple) et pourraient donc fort bien être exploités par des opérateurs privés sans régulation particulière de la personne publique (autre que la préservation de son infrastructure et de son affectation), à l’image du traitement des autorisations privatives du domaine public terrestre (ex.: la publicité sur le mobilier urbain).
Le déploiement, à vitesse rapide, de la ville servicielle se trouve aujourd’hui dans l’angle mort du droit : les juristes doivent urgemment conduire une revue critique des outils d’identification du service public et passer au tamis tous ces usages nouveaux pour bien distinguer ceux qui doivent relever de la compétence publique et ceux qui ne le doivent pas.
Du beau travail en perspective …
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