Tribunal Judiciaire de Paris, 29 septembre 2021, Ville de Paris c. Loueurs Airbnb (ou autres plateformes), affaires multiples
Les faits
La Ville de Paris a fait assigner en référé des loueurs Airbnb (ou autres plateformes) devant le Tribunal judiciaire de Paris aux fins de condamnation des défendeurs à lui payer une amende civile pour avoir enfreint les dispositions de l’article L.631-7 du code de la construction et de l’habitation, autrement dit pour changement d’usage illégal d’habitation à commercial.
Le TJ a sursis à statuer dans l’attente de la décision par laquelle la CJUE a finalement considéré la règlementation nationale conforme aux dispositions de la directive 2006/123/CE (CJUE, 22 septembre 2020, Cali Apartments, affaires jointes C-724/18 et C-727/18).
L’administration doit-elle établir la preuve de l’existence préalable d’un local à usage d’habitation lorsqu’elle invoque un changement d’usage illicite ?
La décision
Par définition, la caractérisation d’un changement d’usage illicite nécessite au préalable d’établir l’existence d’un local à usage d’habitation.
Un local est réputé à usage d‘habitation s’il était affecté à cet usage au 1er janvier 1970 et cette affectation peut être établie par tout mode de preuve. Conformément à l’article 9 du code de procédure civile, la charge de la preuve incombe à l’administration lorsqu’elle invoque un changement d’usage illégal et toute preuve portant sur un usage postérieur au 1er janvier 1970 est inopérante (Cass, 3ème civ., 7 novembre 2019, n°18-17.800 ; Cass, 3ème civ., 28 mai 2020, n°18-26.366).
Commentaire
Le changement d’usage se définit comme la transformation de locaux d’habitation en des locaux dédiés à un autre usage, requérant une autorisation préalable, délivrée par le maire de la commune concernée.
En particulier, le CCH qualifie explicitement « le fait de louer un local meublé destiné à l’habitation de manière répétée pour de courtes durées à une clientèle de passage qui n’y élit pas domicile » comme un changement d’usage, sauf par exception lorsque le local à usage d’habitation constitue la résidence principale du loueur.
En l’espèce, le Tribunal judiciaire condamne les loueurs et prononce des amendes civiles uniquement lorsque la Ville établit la charge de la preuve qui lui incombe (par exemple par la production d’une fiche « H2 » datée de 1970 mentionnant explicitement une location), et à l’inverse la déboute de ses demandes lorsque qu’elle échoue à établir une preuve suffisamment explicite.