Dans une réponse du 29 janvier 2019, le Ministre de l’Action et des comptes publics a apporté des éclaircissements sur la question de la mise en concurrence des titres d’occupations du domaine privé délivrés en vue d’une exploitation économique.
Conformément à l’ordonnance n°2017-562 du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques, la délivrance des titres d’occupation du domaine public est soumise à une obligation de sélection préalable dès lors que le titulaire entend exercer une activité économique.
En revanche, l’ordonnance, ni aucun texte de droit français, ne prévoit un régime équivalent pour les titres d’occupation du domaine privé (bail civil, bail d’habitation, bail commercial, bail emphytéotique, etc.).
Contenu de la réponse ministérielle
Le Ministre de l’Action et des comptes publics a donc été saisi de la question de savoir si la délivrance des titres d’occupation sur le domaine privé était soumise à une procédure de sélection préalable, à l’instar des titres d’occupation du domaine public.
La réponse rappelle d’abord le principe issu de l’ordonnance du 19 avril 2017 selon lequel la délivrance des titres d’occupation domaine public en vue de permettre une exploitation économique doit faire l’objet d’une telle procédure, et confirme ensuite que ladite ordonnance n’a pas modifié, en droit interne, le régime relatif au domaine privé.
Toutefois, considérant que l’ordonnance du 19 avril 2017 a été prise à la suite de la jurisprudence européenne (CJUE 14 juillet 2016, Promoimpresa Srl et Mario Melis e.a., affaires C-458/14 et C-67-15) et que cette jurisprudence n’opère pas de distinction entre le domaine public et le domaine privé, la réponse ministérielle en déduit que les obligations procédurales issues de l’ordonnance doivent être étendues aux titres d’occupation du domaine privé dans les mêmes conditions.
En conséquence de cette analyse, les autorités gestionnaires du domaine privé sont tenues de « garantir le respect des principes d’impartialité, de transparence et d’égalité de traitement des candidats en mettant en œuvre des procédures similaires à celles qui prévalent pour le domaine public et qui sont précisées par les articles L. 2122-1-1 et suivants du code général de la propriété des personnes publiques ».
Portée de la réponse ministérielle
La réponse du gouvernement relève de la doctrine administrative et n’a pas de valeur juridiquement contraignante directe. Elle ne modifie pas mais interprète le droit existant et il n’y a donc en principe aucune obligation supplémentaire à mettre en concurrence les titres d’occupation du domaine privé.
Elle ne peut ainsi à elle seule suffire à étendre le champ d’application de l’ordonnance du 19 avril 2017, expressément limité au domaine public.
En revanche, elle rappelle à juste titre la nécessité de respecter la jurisprudence européenne et par conséquent l’obligation de procéder à une sélection préalable à la délivrance des titres d’occupation du domaine privé, dans les conditions et les limites de ladite jurisprudence.
En outre, compte tenu de cette réponse ministérielle, le juge administratif amené à se prononcer sur les conditions d’attribution d’un titre d’occupation du domaine public en vue de l’exercice d’une activité économique se montrera d’autant plus stricte face à un titre d’occupation de domaine privé passé de gré à gré.
Enfin cette réponse ministérielle souligne avec force la position du gouvernement déjà exprimée dans le rapport au Président de la République relatif à l’ordonnance du 19 avril 2017 relative à la propriété des personnes publiques et laisse présager un alignement législatif futur des obligations procédurales introduites par l’ordonnance du 19 avril 2017 à la délivrance des titres d’occupation du domaine privé.