Nicolas Hulot et Jacques Mézard ont conjointement présenté vendredi dernier le plan de rénovation énergétique du Gouvernement et lancé une consultation publique de deux mois en vue de préciser, compléter et promouvoir ce projet.
Les objectifs essentiels du plan demeurent en droite ligne avec les politiques publiques arrêtées depuis le Grenelle de l’environnement, ce qui peut être considéré comme une constance vertueuse des pouvoirs publics. Plus précisément, le plan vise à :
- Accompagner tous les ménages dans la rénovation de leur logement et prioritairement lutter contre la précarité énergétique des ménages modestes,
- Faire des bâtiments publics des bâtiments exemplaires en matière d’efficacité énergétique,
- Créer une nouvelle dynamique de filière pour rénover plus, mieux et moins cher,
- Entraîner les territoires par la mobilisation des acteurs locaux.
Pour parvenir à la sobriété énergétique de la France, le plan décline 4 axes.
L’axe n° 1 vise à « faire de la rénovation énergétique une priorité nationale identifiée aux objectifs hiérarchisés » : l’idée sous-jacente est de mettre un peu de cohérence dans les multiples initiatives qui se sont développées sur le territoire. Cette fédération des énergies sous une marque unique est censée permettre une mobilisation collective apte à parvenir à l’objectif, déjà ancien, des 500.000 rénovations de logements par an, réparties comme suit :
- 150 000 logements correspondants à des passoires thermiques pour des ménages en situation de précarité énergétique, dont au moins 75 000 financés par l’ANAH, l’autre moitié incombant au secteur privé ;
- 100 000 logements sociaux financés par les bailleurs sociaux ;
- 250 000 par les particuliers aidés par le CITE et les certificats d’économie d’énergie, le gouvernement s’engageant à stabiliser les dispositifs d’aide à compter de début 2019 et sur la durée du quinquennat : cet engagement, s’il est tenu, favorisera certainement la massification de l’action en permettant à de grands acteurs du bâtiment de s’investir dans ce programme.
Le plan prévoit aussi la rénovation de 25 % du parc immobilier de l’Etat.
A dire vrai, on peut douter du caractère opérationnel de ce dernier élément du premier axe, dès lors qu’il ne met en œuvre aucun moyen nouveau, s’appuie sur des forces dont on peut douter de l’appétit à accompagner l’Etat, ou sur l’Etat lui-même réputé « exemplaire » depuis la loi Grenelle 1…
L’axe n°2 porte sur la lutte contre la précarité énergétique et la massification de la rénovation pour les particuliers. Ce double objectif est opportunément réaffirmé par le Gouvernement et devrait se traduire par :
- Une réforme globale des aides à la rénovation courant 2018,
- L’étude de nouvelles incitations (l’idée d’un bonus-malus faisant son chemin…),
- La professionnalisation des DPE,
- Le déploiement organisé des services publics locaux de la performance énergétique.
S’agissant de la massification, qui est une voie nécessaire, le plan compte sur le développement de programmes massifiés de rénovations de bâtiments de même type. Cette démarche, inspirée par EnergieSprong, ne paraît toutefois pas intégrer les difficultés liées à cette approche, et demeure un peu théorique.
L’axe n°3 porte sur la rénovation des bâtiments publics et tertiaires. En premier lieu, 1,8 milliards d’euros de travaux devraient être engagés par l’Etat pour rénover en 5 ans 25% du parc immobilier de l’Etat. C’est une très bonne nouvelle si cet engagement est tenu car il permettra à l’Etat de se placer lui-même dans la dynamique qu’il impulse pour les autres mais pratique peu pour lui-même. Il reste à espérer que le secteur public local poursuivra ses efforts en ce sens et ne réduira pas son engagement du fait de la baisse des dotations publiques locales ; à cet effet, la Caisse des dépôts devrait mobiliser 3 milliards d’euros de prêts et fonds propres pour rénover les bâtiments des collectivités territoriales.
« Afin d’agir à grande échelle, seront déployées des nouvelles méthodes de financement des contrats de performance énergétique permettant de confier la rénovation à des entreprises engagées sur un niveau d’ambition d’économie d’énergie, entreprises qui se rémunéreront en grande partie sur les économies d’énergie» (communiqué de presse des ministres).
Cette démarche a déjà été initiée par le Plan Bâtiment Durable et la Caisse des Dépôts en octobre dernier en vue de la rénovation des bâtiments éducatifs.
Enfin, de façon assez classique mais très peu diserte, le plan se clôture par un axe n°4 relatif au renforcement des compétences et de l’innovation.
Au final, ce plan ne marque aucune rupture, ce qui est sans doute une bonne chose. Il manque néanmoins un souffle et une vision à même d’entrainer une mobilisation sociétale d’ampleur, du fait d’une approche encore trop technocratique et faiblement opérationnelle.
On retiendra néanmoins que le plan renoue avec celui érigé au lendemain du Grenelle, qui avait largement porté ses fruits. Toute la question revient à se demander si ce plan Macron aura, dans la durée, l’accompagnement politique nécessaire et s’il bénéficiera sur les territoires d’une animation suffisamment reconnue, à l’instar du Plan bâtiment durable, pour en assurer l’efficacité.