Secret de l’instruction et établissement de la taxe d’aménagement applicable à des constructions sans autorisation

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CE, 10 décembre 2021, n° 431472

faits

Le 21 juin 2004, le maire d’Arles a délivré à un particulier un permis de construire pour la construction de box à chevaux d’une surface hors œuvre brute de 40 mètres carrés. Par un arrêté du 17 janvier 2005, un permis modificatif autorisant le particulier à modifier l’implantation de ces box et à réaliser une piscine a été délivré. Le 18 septembre 2012, un procès-verbal établi par la commune a constaté la présence de deux bâtiments d’habitation sur la parcelle, édifiés sans autorisation d’urbanisme.

L’administration a ensuite adressé au contrevenant une lettre datée du 24 juillet 2015 qui, d’une part, faisait état de l’édification d’une construction sans autorisation en se référant au procès-verbal de constat d’infraction dont elle avait été rendue destinataire et, d’autre part, déterminait les bases de la taxe d’aménagement ainsi que des pénalités correspondantes.

Par la suite, deux titres de perception ont été émis à l’encontre du contrevenant au titre de la taxe d’aménagement, de la redevance d’archéologie préventive et des pénalités correspondantes.

Le 4 mars 2019, le contrevenant se pourvoit en cassation contre le jugement du tribunal administratif de Marseille qui avait rejeté sa demande tendant à la décharge de la taxe d’aménagement et des pénalités correspondantes.

Devant le tribunal administratif de Marseille, le contrevenant soutenait que l’administration avait entaché la procédure d’irrégularité en s’abstenant de répondre, avant la notification du titre de perception relatif à cette taxe, à ses demandes tendant à ce que lui soit communiqué le procès-verbal constatant l’infraction. Le tribunal a écarté ce moyen en jugeant que les dispositions de l’article 11 du Code de procédure pénale faisaient obstacle à la communication du procès-verbal.

question de droit

Le secret de l’instruction fait-il obstacle à la communication du procès-verbal d’infraction nécessaire à l’établissement de la taxe d’aménagement ?

Décision

Saisi d’un pourvoi en cassation, le Conseil d’État juge que les dispositions de l’article L.331-22 du Code de l’urbanisme dans sa version applicable au litige imposent que les bases et éléments servant au calcul de la taxe soient portés à la connaissance du redevable au moins trente jours avant la mise en recouvrement.

Ces dispositions impliquent que « le procès-verbal d’infraction, nécessaire à l’établissement de la taxe d’aménagement, puisse être porté à la connaissance du contribuable pour lui permettre de faire valoir utilement ses observations. Elles relèvent par suite des exceptions prévues à l’article 11 du Code de procédure pénale, de sorte qu’il appartient à l’administration de communiquer cette pièce au contribuable qui en fait la demande ou, si elle n’en dispose pas, de l’inviter à présenter sa demande à l’autorité judiciaire« .

En conséquence, en s’abstenant de répondre à la demande du contribuable qui sollicitait la communication du procès-verbal, l’administration a entaché la procédure d’irrégularité. Il est donc fait droit à la demande de décharge de la taxe d’aménagement formulée par le requérant.

COMMENTAIRE

Les contribuables imposés à raison d’une construction édifiée sans autorisation ou en violation des obligations résultant de l’autorisation de construire ne bénéficient pas de l’ensemble des garanties s’attachant à la procédure de rectification contradictoire prévue à l’article L. 55 du Livre des procédures fiscales (LPF).

En effet, l’article L.331-22 du Code de l’urbanisme réserve cette procédure aux hypothèses dans lesquelles une demande d’autorisation de construire ait été déposée. En l’absence de demande d’autorisation, le même article prévoit seulement que « les bases ou les éléments servant au calcul de la taxe et des sanctions applicables sont portés à la connaissance du redevable trente jours au moins avant la mise en recouvrement« . Il reste que l’inapplicabilité de la procédure de l’article L. 55 du LPF ne doit pas conduire à conclure que l’administration est entièrement déliée de l’obligation d’assurer le respect des exigences minimales s’attachant aux droits de la défense.

En particulier, dès lors que l’administration utilise le procès-verbal constatant l’infraction aux règles d’urbanisme pour établir l’imposition, les exigences s’attachant au respect des droits de la défense et à l’article L. 331-22 du Code de l’urbanisme lui imposent sous peine d’irrégularité, lorsque le contribuable le lui demande avant la mise en recouvrement, d’en communiquer copie à ce dernier ou, si elle n’est pas en possession d’une copie de ce document, de l’en informer et de l’inviter à se tourner vers l’autorité judiciaire le détenant.

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